dimanche 26 mai 2013

Clap de fin pour Pulis à Stoke et pas seulement


Fin de partie pour Tony Pulis à Stoke City. Le contrat avec "TP" ne sera pas renouvelé par la direction et ce, après 7 saisons continues de bons et loyaux services. Du même coup, nous signons l'arrêt de notre blog footeux. Une bonne partie de nos thèmes étant consacrés à cette équipe (quand nous ne partions pas dans le "vintage", faute de mieux dans le foot « dit » moderne), nous n'avons plus la motivation pour continuer et livrer des commentaires sur ce foot définitivement mondialisé, uniformisé, aseptisé.

Les Potters version Pulis étaient en effet un des derniers bastions du vrai foot anglais physique et rugueux comme nous l’aimions avec ses abus de longs ballons, longues touches, sa défense de fer et ses recherches des coups de pied arrêtés ("set pieces") pour permettre à ses grands gabarits de s'imposer de la tête.
La société Opta publie régulièrement des statistiques et Stoke est systématiquement classé dernier de toutes les équipes de Premier League pour ce qui est du nombre de passes complétées dans un match tout en étant numéro un sur le nombre de longues balles envoyées. Les Potters sont même régulièrement dans les derniers voire carrément derniers pour ce qui est des tirs cadrés dans une partie, et ce, toutes divisions confondues en Angleterre. C’est bien là la preuve absolue de la très grande force de l’équipe sur les phases arrêtées tout en étant archi-faible dans le jeu ouvert.


Une caricature amusante de Stoke City (version Pulis) par de jeunes comiques norvégiens

Comme à l'ère du mondialisme et du gros fric - qui vont de pair - il y a un aplanissement des styles et des profils de joueurs, alors le Stoke de l’entraîneur gallois était une anomalie qui devait disparaître. D’autant qu’elle était traquée par la presse obsédée par le politiquement correct « beau jeu » consistant à se faire des petites passes à n’en plus finir, quitte à ce que la plupart des équipes ressemblent à des copies très lointaines et très surfaites du Barça, tout en fustigeant le « démodé, ringard, archaïque » jeu long.

Comme l’explique un article d’un blogueur sur le site givemesport.com, le temps des équipes jouant long et avec agressivité, est de plus en plus révolu en Angleterre, du fait même de l’arbitrage.
Un arbitrage de plus en plus strict avec des fautes sifflées plus fréquemment qu’autrefois pour les mêmes actions et une distribution plus généreuse en cartons jaunes et rouges envers les équipes les plus virulentes. Ainsi, le football pratiqué à ras de terre a pu devenir la norme dans le championnat d’Angleterre. En cela, les 5 maintiens successifs de l’équipe de Stoke en Premier League relèvent du grand Art et d’un style en voie d’extinction totale et définitive.

Si l’on en croit la presse anglaise, les fans de Stoke City en auraient eu marre, de même que leur président. Le style de jeu leur déplaisait.
Ces fines bouches oublient un peu vite qu’ils venaient de vivre 23 saisons hors de l’élite et que c’est en jouant de la sorte que Stoke a pu se démarquer, triompher et se hisser de nouveau en Premier League. C’est grâce à ce style que Pulis les y a maintenus pendant 5 saisons, en terminant à chaque fois dans les 14 premiers.
C’est également ainsi qu’ils avaient atteint la finale de la FA Cup en 2011, après avoir pulvérisé Bolton 5-0 en demi-finale, en jouant encore plus « cliché » qu’habituellement. C’est dans ce même style qu’ils avaient fait une bonne campagne européenne la saison suivante, franchissant les poules de l’Europa League pour s’incliner ensuite contre le réputé FC Valence.


Bolton 0 Stoke 5, demi-finale de Cup à Wembley, le 17/04/2011

Tony Pulis s’est dit compréhensif et fier de ce qu’il a accompli : «Bien que je sois déçu, je comprends ce qu’il (le président et propriétaire Peter Coates, NDLR) signifie quand il dit que la direction sent le moment pour orienter le club dans une nouvelle direction. Je m’en vais en étant fier de ce que nous avons réalisé. Mon staff a été super. Je remercie les supporters et tous les joueurs qui ont travaillé sous ma direction».
Ce à quoi Coates répondait de façon tout aussi consensuelle : «Les sept dernières années ont été parmi les meilleures de notre longue histoire et je voudrais remercier Tony pour son énorme contribution à cela. Je le considère personnellement comme un grand ami et cela me manquera énormément de ne plus travailler avec lui». (propos reportés par le Sun)
Dans ce cas, pourquoi le laisser partir ?

Stoke City sous la houlette de Tony Pulis, de 2006 à 2013 :
2012-13: Premier League 13ème avec 42 points
2011-12: Premier League 14ème avec 45 points
2010-11: Premier League 13ème avec 46 points
2009-10: Premier League 11ème avec 47 points
2008-09: Premier League 12ème avec 45 points
2007-08: Championship 2nd avec 79 points
2006-07: Championship 8ème avec 73 points
Source :
http://www.bbc.co.uk/sport/0/football/22637808

Tony Pulis avait cependant vu venir son remplacement dès le mois de décembre de l’année dernière si l’on en croit le Guardian.
A l’approche de Noël, Peter Coates, le proprio, avait nommé Mark Cartwright, ancien gardien de but de Wrexham et de Shrewsbury puis reconverti agent de joueurs, au poste de directeur technique qu’il venait de créer – et « deux mondes entrèrent en collision » pour reprendre les termes du journal anglais.
Les relations entre les deux n’étaient pas au beau fixe. D’un côté, un coach de 55 ans, « à l’ancienne », dépensier et suspicieux, de l’autre un homme de 40 ans, chargé de repérer et recruter des talents bon marché aux quatre coins du monde.
Bien que Pulis puisse encore donner son avis final sur chaque venue, la nomination de Cartwright signifiait une perte de contrôle pour lui ainsi qu’une critique implicite de la part de Coates sur la politique des transferts menée par le coach gallois durant les 5 dernières saisons.
Celle-ci fut en effet très coûteuse. Pulis fit dépenser au club une somme approchant les 80 millions de livres sterlings. Seuls les clubs de Chelsea et Manchester City dépensèrent plus sur la même période.

Parmi les acquisitions les plus significatives :
•Robert Huth, 2009 (Middlesbrough) £5m
•Kenwyne Jones, 2010 (Sunderland) £8m
•Cameron Jerome, 2011 (Birmingham) £4m
•Peter Crouch, 2011 (Spurs) £10m
•Charlie Adam, 2012 (Liverpool) £5m
•Wilson Palacios, 2011 (Spurs) £8m
Sources :
http://www.bbc.co.uk/sport/0/football/22204110
http://www.guardian.co.uk/football/blog/2013/may/21/tony-pulis-sacking-stoke

Il serait injuste de trouver qu’il n’y ait pas eu de retour sur investissement pour la plupart des joueurs qu’a fait venir Pulis mais on peut penser que Coates ait trouvé excessif de dépenser autant pour des irlandais et des britanniques, plutôt que pour des stars du football mondial, par exemple.
Le président de Stoke était notamment réticent quant à la venue de Peter Crouch, en provenance de Tottenham, pour 10 millions de livres de transfert en 2011. Tony Pulis avait dû beaucoup insister pour l’en convaincre. L’ancien attaquant de l’équipe d’Angleterre a d’ailleurs plutôt déçu, ne marquant que 7 buts en 34 apparitions lors de la saison qui vient de se conclure.
En 2010, les Potters dépensaient 8 millions de livres pour s’attacher les services de Kenwyne Jones (ex-Sunderland), lequel a largement déçu ces derniers mois en ne marquant que trois fois lors de ses 26 dernières apparitions.

Cartwright a fait divers déclarations sur l’importance de recruter des joueurs capables d’amener le club « au niveau supérieur, techniquement et par l’intelligence de jeu » et avec Peter Coates investissant du temps et de l’argent dans l’académie de jeunes du club, il était un fait établi que TP leur donnait peu leur chance dans l’équipe, de même que d’une façon générale, il alignait rarement des joueurs de moins de 24 ans, s’appuyant sur les mêmes, capables de se fondre dans son système de jeu.
Il avait ainsi écarté le turc Tuncay Sanli, un joueur talentueux, créatif et tout en improvisation. Dans le même genre, le très complet Charlie Adam a dû beaucoup batailler pour réussir à se faire une place dans l’équipe.
C’est ce qui énervait le plus les fans, si l’on en croit le Guardian.

Pour remplacer TP, la direction a dans le viseur Roberto Di Matteo, Gus Poyet, Roberto Martinez, Rafael Benitez, et depuis peu, Mark Hughes qui serait le favori, selon la presse anglaise.
Laisser tomber Pulis pour prendre Mark Hughes, ce serait comme se séparer de Laurent Blanc pour signer Domenech. Ce même Mark Hughes qui n’avait rien fait à la tête d’un Man City avec un effectif en or puis qui a amplement contribué à reléguer les QPR malgré une équipe très séduisante sur le papier. On imagine avec lui un bel avenir pour Stoke … à l’étage inférieur, d’autant que les Potters ont pratiquement conclu la vente de leur excellent gardien Begovic à Liverpool et cela devrait rendre très difficile la transition voulue par la direction, pour la saison prochaine.

Avec Pulis, les Potters avaient montré leurs limites, souvent impuissants contre les grosses cylindrées mais forts de leur identité de jeu, ils perturbaient un certain nombre d’équipes qu’ils surclassaient dans les domaines aérien et physique, et contre lesquelles ils accumulaient les points. Stoke s’est maintenu 5 fois de suite en étant rarement inquiété par la relégation en cours de saison.
Il y aurait eu un bel avenir sans perdre totalement cette identité de jeu, avec ou sans Tony Pulis, en reproduisant ce que fait par exemple Sam Allardyce à West Ham, à savoir, varier les styles de jeu selon les équipes rencontrées. Jouer long et aérien contre les formations qui en souffriraient et être en mesure de jouer convenablement au sol quand cela est préférable.

Le dernier club encore « à l’anglaise » qu’il faudra supporter en Premier League, la saison prochaine, c’est bien évidemment le West Ham de Sam Allardyce.
La direction donne pour l’instant sa confiance à « Big Sam » et le club s’apprête à casquer cher pour conserver sa tour de contrôle aérien Andy Carroll qui ne fait ni envie à Newcastle, ni à Liverpool qui sont devenus des équipes de pied-tendres jouant au ras du sol et où évoluent un nombre très réduit d’anglais.
« Big » Sam est maintenant le dernier des mohicans, à préserver un peu de style anglais authentique en Premier League.
Sinon, il faut aller voir en D3 anglaise (et les étages en-dessous) pour commencer à voir du vrai jeu anglais « à l’ancienne ».
Le jour où le board et les supporters des Hammers en auront marre d’Allardyce comme la direction et certains fans de Stoke en ont eu marre de Pulis, alors West Ham se verra coaché par Di Matteo, Di Canio ou Di Machin-truc-bidulio et le style anglais sera définitivement enterré dans toute la Premier League. C’est une question de temps, simplement. De même qu’on imagine que les arbitres anglais vont siffler toujours plus et définitivement ressembler aux arbitres de toute l’Europe en sanctionnant le moindre contact.

Quant à Stoke City, s’ils décident effectivement de tourner complètement le dos à leurs valeurs et à leur style présent pour se mettre à jouer comme toutes les autres équipes, alors à moyen terme, cela en sera fini de leur présence en Premier League. Les joueurs et les équipes étant interchangeables, ces dernières se hiérarchisent par la qualité technique de leurs éléments en provenance du monde entier. De ce fait, les clubs pouvant mettre le plus gros paquet de fric, tant en salaires qu’en transferts pour faire venir les meilleurs, sont généralement ceux que l’on retrouvera en haut de classement en fin de championnat, étant donné que tout le monde joue pareil.
Le style de jeu qui avait permis à Stoke de prendre des points contre un certain type de formations étant renié, alors les Potters deviendront une équipe à budget moyen parmi d’autres, et comme rien ou pas grand-chose ne les distinguera plus de la masse des équipes classées entre la 8ème et la 20ème place, ils s’en remettront à la loterie de la relégation, à égale chance avec des clubs comme Norwich, Sunderland ou West Brom, par exemple.
Peut-être réussiront-ils leur première saison de transition avec leur nouveau coach mais nous ne parierons pas sur eux pour un maintien sur les 3 prochaines saisons.

Il est bien sûr et certain qu’après un tel reniement de leur style, de leur coach et de tout ce qui a pu leur permettre de triompher, s’il y a une relégation à espérer pour la saison prochaine ou celle d’après, c’est bien celle du Stoke City nouvelle mouture. Et plus qu’aucune autre équipe.

Sources :
http://www.topmercato.com/65743,1/stoke-city-hughes-favori.html#ixzz2U9XAXrNW
http://www.guardian.co.uk/football/blog/2013/may/21/tony-pulis-sacking-stoke
http://www.givemesport.com/347195-tony-pulis-departure-the-end-of-long-ball-tactics
http://www.thesun.co.uk/sol/homepage/sport/football/4938389/Tony-Pulis-disappointed-by-Stoke-exit-but-understands-need-to-change-things.html
- Metro UK du 23/05/2013

Le Lecteur (Honoré Daumier, XIXème siècle)
(wikipedia)

Nous remercions nos lecteurs pour leur fidélité pendant ces 4 années. Nous remercions l’ensemble des contributeurs et plus particulièrement notre consultant pour l’Espagne, Euskerra, pour ses topos précis et spécifiques sur le football ibérique, nous remercions Kevin Quigagne (du blog Teenage kicks) pour ses commentaires de grande expertise du foot outre-Manche, de même que l’excellent blogueur pailladin « Pailladiction » pour sa grande connaissance du football héraultais et son blog plein d’humour et de talent.
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En ce qui nous concerne, nous allons voguer vers d’autres latitudes. Ce football-là n’est définitivement plus le nôtre. Il est possible que nous créions dans les prochaines années un blog consacré au football des 20 à 40 dernières années.

Dans l’immédiat, nous allons nous consacrer à de nouveaux blogs par l’écriture et le relai de nouvelles concernant la grave crise économique, la dénonciation du monde bancaire, le mondialisme, l’ultralibéralisme ainsi que la mise en place d’un marché transatlantique pour 2015, au nez et à la barbe des peuples.

Nous dédions ces 4 années de dissidence footeuse – sujet ô combien léger – à Bruno Boulefkhad, un entrepreneur ruiné par le système bancaire, qui a décidé de ne rien lâcher.


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Bonne continuation à tous.

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